D’aussi loin que je me rappelle, je n’arrive pas, ou très peu, à exprimer mon émotion de colère. Je tempère jusqu’à éteindre le feu en moi. Je tente par tous les moyens d’atténuer; je trouve des explications à des incidents graves plutôt que de les vivre franchement et réussir à m’en libérer. J’avoue les accumuler; chaque couche froissée s’entasse pour former une boule d’acier dans mon estomac. J’ai dû mal à porter cette boule grossissante.
Pour moi, l’expression de la colère amène forcément, férocement, des conséquences malheureuses, tellement malheureuses que j’en ai regretté amèrement mes paroles, mes actions, jusqu’à devenir un être méfiant. Les seules fois où j’ai osé, j’ai échoué. Je sais qu’on n’efface pas des années de blessures, par contre, je suis rendue à un tournant de ma vie où je n’ai plus de place de refoulement dans mon for intérieur.
Je suis porteuse d’une belle cinquantaine d’années de référence. C’est ainsi que je peux optimiser ma détresse d’avant. Je ne suis plus en danger. J’apprends chaque jour à faire confiance aux gens; pas facile. Je fonctionne encore et encore sur un échelon d’essais-erreurs. Le moindre pas vers quelqu’un représente pour moi un temps d’analyse, d’approche douteuse, souvent incompréhensible pour l’autre.
Un jour prochain, je réussirai à expliquer exactement cette approche de l’autre si lente… L’autre comprendra à un point tel que je ressentirai de l’encouragement plutôt qu’un jugement. Je m’ouvrirai à l’autre à un point tel que mon cœur suivra la parade.
Ce n’est aucunement la faute de l’autre s’il n’arrive qu’à percevoir mon ombre. Le rôle d’expression m’appartient entièrement. J’y travaille! Oh que oui! J’y arriverai à petites doses, je me le promets. Ce que je déterre en moi est laid, blessant, voire même traumatisant. C’est pourquoi je garde un rythme respectant mes capacités.
J’ai compris qu’entasser les chagrins, la colère, pour les éteindre n’est qu’illusion… un sacré conte utopique!