Je suis une comédienne née! Tout ce que vous verrez de moi : sourire et bonne humeur. J’ai appris à bien me ternir pour passer à travers, supporter mon petit sac de douleur, devenu bien lourd au fil des années. Étant d’une nature extrêmement sensible, je divise par dix mes émotions pour me fondre dans la communauté. Là, je réponds à la facilité.
J’ai accumulé un nombre fort impressionnant de rôles bienveillants, jusqu’à m’y perdre complètement. Mon moi est maintenant confondu dans un moule, on ne se pose plus de question à mon sujet. J’ai pris une suite de mandats de secours, car aider mon prochain me permettait de taire mes horribles rengaines.
Pour ma part, ça remonte à très loin, ce mal de moi qui me donne une moitié de vie. Des abus physiques, psychologiques, sexuels… encore plus graves lorsqu’ils sont enfouis, car ils incarnent la honte. Des attouchements agressifs depuis la puberté, sous entendez les seins, par mes camarades de classe, jusqu’à mes plus récentes approches amoureuses, sous entendez la volupté du corps de femme. Toute la violence, toute l’intimidation, laissent des traces indélébiles.
Je souffre d’anxiété au plus loin de ma mémoire d’enfant. D’abord des espaces m’interdisant l’accès aux classes, jusqu’à l’anxiété sociale que vous devinerez par mes rapports peu valorisants avec mes co-humains. Étant jeune, professeurs, parents, médecins, très peu de gens se posaient des questions à voir une enfant aussi enfermée, qui avait peine à parler, en hyperventilation, qui s’instruisait d’elle-même dans les bibliothèques.
Nul besoin de vous confier qu’en tant que professeure aujourd’hui, je les reconnais ces jeunes. Plus d’excuse qui vaille maintenant. En cette semaine de la santé mentale, tendez l’oreille, la main, les bras et faites en sorte qu’un geste amène énormément de réconfort à ces personnes souffrantes, avant que le mal gagne trop de terrain et se vit en intolérance. Chaque personne a son rôle à jouer pour que la vie en société soit plus clémente en taisant les jugements.
Toute une vie à piétiner des incidents douloureux n’est pas facile à remettre en place pour poursuivre sa route. Pour ma part, je m’y efforce : je vise une belle guérison qui me permettra de voir de l’éclat partout et de me sentir un peu meilleure à chaque pas cheminé.
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Julie