L’amour c’est beau lorsqu’il est véritable. Chacun y apporte ce qu’il a de plus précieux, de plus intime. On donne, on s’offre, on partage. On rit, on s’émeut. Et puis il arrive parfois que l’on dévie doucement, sans s’en rendre compte. Au nom de l’amour l’autre bafoue nos territoires, piétine notre jardin secret.
Loin d’imaginer qu’il puisse y avoir manipulation de sa part, l’emprise s’installe et on cède, on renonce, on fait des compromis, on se sacrifie … trop. On se déshonore, on s’efface, on s’égare, pour finalement se flétrir, sombrer et s’éteindre.
Au bord du précipice l’urgence nous saisit. Mais comment récupérer son pouvoir ? Comment reprendre ce qui nous appartient ?
C’est peut-être le plus beau moment de l’amour ! Celui où l’on réalise que pour survivre à cette chute vertigineuse il va falloir apprendre à s’aimer soi… à se choisir en priorité !
« Je reprends ce qui est à moi, je te rends tout ce qui t’appartient ! »
Je répète ces mots en boucle comme une conjuration, un sortilège … C’est terminé, le jeu est fini. Si tu veux je te laisse le podium, la première place ! Tu as gagné. Tu peux repartir avec le trophée. Moi je garde tout ce qui m’appartient. Tout ce que tu n’as pas su me dérober. Toutes ces batailles que tu n’as pas gagnées.
« Je reprends ce qui est à moi, je te rends tout ce qui t’appartient. »
Je ne garde rien de toi. Je lave mon âme des paroles qui m’ont fait me sentir sale. De celles qui ont transformées mes forces en faiblesses et mes qualités en défauts… Tous ces mots je te les rends.
Je jette un regard bienveillant sur le champ de mes valeurs lapidées. Je les relève une à une et les remets à leur place. En me promettant de les honorer je retrouve mon identité… Et les pierres je te les rends.
Je recouds l’immense béance de mon cœur abusé. Il mettra du temps à cicatriser. Mais déjà l’amour revient l’animer, le faisant frissonner et rêver à une union sacrée… Alors le poignard, je te le rends.
Tant de croyances qui me collent à la peau, comme des tatouages de tolard que tu as gravés à mon insu, dans mon esprit. Leurs ombres survolent mon espace, leur présence ombrage mon horizon : « Tu n’es pas capable », « tu ne peux pas t’en sortir seule » … Mais tes gribouillis, je te les rends aussi.
« Je reprends ce qui est à moi, je te rends tout ce qui t’appartient. »
Il n’y a plus aucune place pour toi dans mon cœur, dans ma vie. Je te vois tourner autour de moi pour trouver une faille pour t’infiltrer, pour continuer d’exister… pour retrouver ce minable sentiment en moi, que sans toi je ne suis rien. Mais regarde-moi bien ! regarde-moi briller de mille feux sans toi. Rire encore sans toi. Vivre plus fort. Ressentir plus vrai. Vibrer plus intensément et m’élever plus haut.
Je n’ai pas besoin de toi mais toi oui. Tu as besoin de l’autre pour te remplir de sa substance, mais je ne serai plus jamais cette personne qui te fait te sentir exister. Tu peux continuer à chercher cette faille, ce passage si souvent fréquenté naguère, il n’en reste rien.
Je me projette vers demain sans une miette de toi. Je me reconnecte à mon essence, mon optimisme, ma foi, ma croyance profonde que je suis capable de tout … Et tes barrières qui retenaient mon imaginaire je les franchis à grands coups de rêve.
Je calme mon esprit et j’aperçois de nouveau mes rêves et mes projets. Ceux de la petite fille fragile, de la jeune femme timide, de l’épouse rabaissée, de la mère surchargée. Je comprends soudain qu’en les atteignant je te tuerai enfin… Alors ton ombre qui assombrissait mon ciel, je vais l’inonder de toute ma lumière.
C’est elle qui t’a attirée et c’est elle qui te fera disparaître. Mais ça tu le sais depuis le jour où tu l’as touché du bout des doigts. Oui ce jour-là tu as compris que tu ne possèderas jamais rien d’autre que son pâle reflet. En réalité tu n’existes pas. Tu n’es personne, même plus une ombre, qu’une simple coquille vide. Tu es le fruit d’une misérable copie de tout ce que tu trouves de beau chez l’autre. Une mauvaise imitation sans authenticité ni valeur. Tu n’es que la boue dans le marécage de tes mensonges, et tout ce que tu as cru me voler, tu ne l’as même jamais effleuré.
« Je reprends ce qui est à moi, je te rends tout ce qui t’appartient. »
Je laisse s’envoler les derniers liens d’un hier qui n’était que chagrin. Mon sac à dos rempli de tout ce qui m’appartient, je sais que je n’ai plus besoin du tien. Soulagée du poids de tout ce qui est à toi, le cœur léger mon âme se déploie.
Pour récupérer son pouvoir il faut cesser le combat. C’est en déposant nos armes que l’on fait de la place pour qu’il puisse de nouveau nous remplir. Le cœur libéré de toute amertume il le comblera de paix. L’âme délivrée du tourment de la culpabilité, il déposera de la sérénité, et le corps guéri de ses maux retrouvera la douceur. C’est alors que l’on sentira cette vibration nous envahir et reprendre ses droits dans notre cœur : « Je suis moi et je ne t’appartiens pas. »