Monsieur V. est banquier. Le matin, avant même d’entrer dans son agence, il fume deux cigarettes à la suite. “C’est le seul moyen, dit-il, pour faire tomber la pression avant de commencer la journée”.
Monsieur G., représentant des salariés dans son entreprise, ne peut s’empêcher d’en griller une (voire plus) après chaque réunion avec la direction. “La situation est tellement tendue qu’elle me met en colère”, avoue t-il.
Ces deux hommes, comme beaucoup d’autres, sont soumis à un stress quotidien important. La seule solution qu’ils connaissent pour déstresser, c’est de fumer.
On va pas se mentir, pas ici. Franchement, fumer n’est-ce pas la pire méthode pour se relaxer?
Alors oui, c’est vrai, qu’après un bon coup de pression, en griller une, ça détend ou plutôt, ça donne cette impression. Mais pendant combien de temps ? Quelques minutes tout au plus !
Fumer pour gérer le stress, c’est entrer dans un cercle vicieux, comme nous allons le voir.
Stress et cigarette
Une fois dans le sang, la nicotine et les autres constituants de la cigarette vont agir sur tout un tas de neurotransmetteurs et d’hormones (principalement dans le cerveau).
La nicotine, par exemple, agit sur l’axe HPS (hypothalamo-pituito-surrénalien), le système de réponse au stress. L’hypothalamus sécrète une molécule appelée CRF. L’hypophyse activée par cette molécule, produit à son tour l’ACTH, qui passe dans le sang et provoque la libération, par les glandes surrénales, de cortisol et d’adrénaline (glucocorticoïdes).
Le cortisol est, comme qui dirait, un “super carburant”. Face à un danger, l’axe HPS est enclenché pour augmenter la production de cortisol. En se liant au bon récepteur sur les cellules, le cortisol va, soit donner plus d’énergie au bras pour se défendre, soit au jambes pour courir plus vite afin de se mettre en sécurité. Tout dépend du danger – surtout du ressenti de la personne face au danger.
Mais le cortisol n’est pas seulement sécrété en phase de stress. Si le matin nous nous levons et que le soir nous avons besoin de dormir, c’est à cause de lui. Le cortisol régit nos cycles circadiens. Nous en avons besoin, il est vital au bon équilibre de notre corps. Mais ses réserves ne sont pas éternelles. Quand les glandes surrénales sont épuisées, le corps doit compenser avec les autres glandes endocrines, notamment la thyroïde.
Vous comprenez bien que si la machine à produire le “super-carburant” se met en route sans que derrière il ne soit brûlé, à force, cela endommage toute la machine.
De plus, le CRF, la molécule produite par l’hypothalamus (qui est à l’origine de la réponse au stress), continuellement présent dans l’organisme, agirait sur des récepteurs spécifiques dans le cerveau (CRF1) et ailleurs dans le corps (CRF2 dans le tube digestif), avec pour conséquence des troubles mentaux comme l’anxiété, ou encore des troubles intestinaux.
Les effets de la cigarette sur le corps sont tellement nombreux qu’un seul article ne suffirait à tous les passer en revue. Mais retenons que la cigarette est un stresseur physique pour le corps. C’est-à-dire qu’une seule bouffée aura les mêmes conséquences (sur le corps) que de sauter en parachute ou devoir parler en public, surtout si on pense ne pas avoir les compétences pour ça.
Mais contrairement au saut en parachute, la cigarette stresse le corps 10, 15, 20 fois par jour, voire même plus. A peine le temps de revenir au calme, qu’une nouvelle cigarette est allumée, avec les conséquences que vous connaissez maintenant.
Le stress, c’est psychosocial
L’ennemi du bien-être, c’est le stress, c’est bien connu !
Pourtant, le stress est un mécanisme biologique lié à la survie, donc vital.
Dans le langage courant, le stress peut désigner 3 choses :
- la cause de la réaction de stress,
- la réaction à cette cause,
- l’état dans lequel se trouve l’individu qui réagit à cette cause.
Prenons un exemple pour mieux comprendre :
Votre patron vous appelle pour vous demander – à la dernière minute, bien sûr – de faire la présentation du projet à sa place devant le comité d’administration, alors que vous avez une peur bleue de parler en public.
- L’appel du patron = la cause.
- Le cœur qui s’emballe et toutes les autres sensations = la réaction.
- La pression qui monte et le sentiment que vous allez défaillir = l’état.
Donc, quand quelqu’un dit qu’il est stressé, il fait référence à “l’état” dans lequel il est, c’est-à-dire l’interprétation subjective des émotions engendrées par la situation – ce que le célèbre neurobiologiste Antonio Damasio appelle “marqueur somatique”.
Pour reprendre l’exemple ci-dessus, en faisant la présentation à la place de votre patron, vous pourriez vous sentir mal physiquement (trac, boule dans la gorge ou l’estomac, tremblements, bouche sèche, etc..) et psychologiquement (pensées noires).
C’est l’ensemble de ces sensations désagréables que cherche à fuir, à faire taire, chaque fumeur.
Le cercle vicieux du stress
Face à une situation difficile, comme celle évoquée précédemment, n’importe qui, croyant ne pas pouvoir gérer la situation, laissera inconsciemment son corps passé en mode stress.
Les sensations désagréables du stress provoquent l’envie de fumer, le seul moyen rapide de fuir la douleur.
Mais bien que chaque cigarette fumée semble atténuer la douleur temporairement, elles abaissent, en fait, le seuil de sensibilité au stress. Les fumeurs sont beaucoup plus sensibles émotionnellement que les non-fumeurs. Comme l’a montré le professeur Tassin, cela est dû à une modification du système de traitement de l’information par le cerveau.
En fait, c’est comme avoir dépensé quelques milliers d’euros dans un portail ou une porte de garage automatique. C’est super, plus besoin de monter-descendre de la voiture pour ouvrir-fermer le portail ou la porte, ça fait gagner un temps fou (et en hiver, ça évite de se les geler ! ).
Maintenant, imaginez que le portail ou la porte de garage s’ouvre bien quand vous appuyez sur le bouton, par contre, elle ne veut plus se refermer toute seule. Alors pas le choix, il faut la refermer manuellement. Franchement, les milliers d’euros qu’elle a coûté vous restent en travers de la gorge.
Avec la cigarette, c’est le même effet : le passage en mode stress est efficace, par contre le retour au calme (la fermeture automatique) n’est plus autonome, il est manuel et dépend de la cigarette.
Et le pire c’est que beaucoup de personnes se trouvent des excuses pour ne pas réparer, du genre : “c’est pas grave, du moment que le portail s’ouvre, c’est déjà bien !” ou “Et puis, ça me fait faire de l’exercice !”. Vous voyez la stupidité de la situation ?!
A quoi sert un portail automatique, s’il ne se referme pas tout seul ? A rien !
Pour plus de Zen…
Beaucoup en sont encore à se demander si c’est le stress qui donne envie de fumer ou si c’est la cigarette qui stresse. C’est comme la fameuse théorie de qui est apparu le premier, l’oeuf ou la poule.
Plutôt que perdre du temps à débattre sur le sujet, je propose plutôt de rompre le cercle vicieux du stress.
Avant de vous expliquer comment, il faut que je parle des deux modes de fonctionnement du corps.
Défense ou croissance
Le corps humain ne connait que deux états : la défense ou la croissance.
Ces deux modes sont antagonistes, impossible d’être à la fois en défense et en croissance. Mais les deux états sont nécessaires.
Le premier, nous commençons à bien le connaître : c’est le stress.
Le second, son opposé, permet la réparation, la reconstruction, le développement.
C’est exactement la même chose avec les pays. Lorsqu’une nation est en guerre, il n’y a plus de croissance économique. Le meilleur exemple est les USA au lendemain des attentats de 2001. Les américains ont arrêté de consommer (effrayés par ce qu’ils venaient de vivre), à tel point que le président Bush ait dû intervenir pour rassurer la population et relancer la consommation des foyers.
Le zen, le bien-être est un parfait équilibre entre ces deux modes : défense quand c’est nécessaire, et retour en mode croissance quand tous les risques sont écartés.
Rompre le cercle vicieux
Le contraire du stress, ce n’est pas la relaxation, c’est la résilience.
La vie, c’est comme marcher sur un fil à 10 mètres de haut. Vous avez déjà essayé ?
Le secret des funambules, c’est d’utiliser un balancier, vous savez cette longue perche qu’ils tiennent entre les mains. Grâce à ça, ils compensent les déséquilibres et l’instabilité en balançant de droite à gauche à chaque pas.
La résilience, c’est la capacité de “se balancer de droite à gauche”, ou autrement dit du mode croissance à défense, en revenant rapidement au point neutre (état d’équilibre).
Elle inclut des capacités physiques, mentales et émotionnelles, et lorsqu’elle est bien calibrée, le bien-être est au rendez-vous.
Pour faire face au stress, il n’y a pas des milliers de possibilités. Pour reprendre l’exemple de la présentation à faire devant le comité de direction, il y a deux choix possibles pour résoudre le conflit : en pratique ou par le dépassement.
La première, la plus simple, consisterait à se porter malade, par exemple, ou trouver une bonne excuse pour se débiner.
La seconde, plus complexe, implique de trouver les ressources manquantes pour traverser l’épreuve avec succès. Les méthodes et techniques sont quasi illimitées, par exemple suivre une formation pour prendre la parole en public ou encore utiliser la PNL, les TCC ou l’EFT pour déprogrammer la peur.
Bref, la deuxième solution est de loin la meilleure mais aussi celle qui réclame le plus d’efforts. L’essayer, c’est l’adopter !
Arrêtez tant qu’il en est encore temps !
Vouloir arrêter de fumer peut être en soi une source de stress. La meilleure façon d’y faire face, c’est par le dépassement, ce qui exige une bonne préparation.
La première chose à faire est de comprendre et d’accepter que la cigarette n’est pas “une amie qui vous veut du bien”.
La seconde chose : trouver une motivation personnelle assez puissante pour vous donner la force d’arrêter.
La troisième chose à faire : trouver l’aide dont vous aurez besoin, ce qui inclut le soutien social de vos proches ainsi que celle de professionnels, sans oublier les aides naturelles.
Et enfin, passer à l’action !
Conclusion
Devenir résilient c’est l’objectif de tout à chacun pour devenir la meilleur version de soi. Et dans cet objectif la cigarette ne peut trouver sa place.
Et pour finir j’aimerais citer Sonia Lupien, la directrice du centre d’études sur le stress humain (au Québec) : “La résilience c’est avoir un plan B, un plan C, un plan D, etc. pour faire face à la situation qui nous stresse”.
En résumé le zen c’est une vraie gymnastique mentale et émotionnelle !!!
Michael du blog StopTabac.net