La décision de quitter quelqu’un est un choix extrêmement difficile à prendre. Un regard chargé de douceur, posé sur celui ou celle qui fut un alter ego, retarde ou empêche bien souvent cette prise de décision. Cependant, lorsque l’amour s’est éteint, qu’aucune étincelle n’anime plus le cœur, il faut avoir le courage de partir.
Ce deuil amoureux infligé à cet Être que nous portions dans notre cœur, provoque un grand sentiment de culpabilité chez celui qui s’en va. Il sera subi par les deux anciens partenaires de vie, de façon différente.
Après le coup de massue provoquée par une telle décision, la personne délaissée se sentira envahie par la tristesse, la colère et le sentiment de rejet.
Le fait de quitter peut sembler facile, or se séparer d’une personne que l’on a profondément aimée peut provoquer une grande souffrance chez celui qui s’en va, un sentiment de culpabilité et un immense malaise, sous le regard accusateur des autres.
Dès lors, faut-il poursuivre une relation où les cœurs ne battent plus à l’unisson pour ne pas blesser la personne que l’on souhaite quitter ?
Faut-il maintenir l’illusion d’une vie familiale heureuse lorsque des enfants sont nés de cet amour dissipé ?
Le fait de quitter est-il un acte égoïste de celui qui s’en va ou peut-il être considéré comme un acte de sincérité et de transparence vis-à-vis de l’autre ?
Il n’est pas rare que lorsque l’amour n’anime plus l’un des partenaires mais qu’il décide de poursuivre la relation, celui-ci recherche ailleurs cette étincelle nécessaire dans toute vie.
Quitter pour ne pas trahir et offrir une dernière marque de respect à cet autre que l’on a tant aimé.
Loin d’être une décision facile, se résoudre à partir et lâcher cette main familière engendrera une grande souffrance et un immense sentiment de culpabilité chez celui qui s’en va.
« La culpabilité est un fardeau insupportable, mais souvent il est plus facile de le porter que de se confronter à la vérité. »
– Paulo Coelho
Depuis plusieurs jours, elle avait l’impression d’être sur une barque s’éloignant lentement de la rive dans le brouillard. Chaque fois qu’elle posait les yeux sur cet homme avec lequel elle partageait sa vie depuis de nombreuses années, elle se sentait envahie d’une immense tristesse.
Le temps avait eu raison de leur relation et l’amour avait fini par se transformer en une profonde et sincère affection.
Une vie parfaite, de magnifiques enfants, un rythme de vie parfaitement cadré, les avait conduits vers l’habitude, la lassitude et l’ennui.
Elle réalisait que, n’ayant qu’une seule vie, elle devait prendre son courage à deux mains pour mettre un terme à cette relation dont le feu s’était progressivement éteint.
Comment pouvait-elle se résoudre à prendre une telle décision et tout détruire ? Comment pouvait-elle imposer une telle tristesse à ses enfants ? Comment pouvait-elle anéantir cet homme qu’elle avait profondément aimé et qui lui témoignait encore chaque jour son amour ?
Ne pouvant se résoudre à briser cette famille et plonger chacun de ses paisibles maillons dans la déception et les larmes, les jours sans lumière se succédèrent, semblables les uns aux autres et dénués de joie.
Le cœur lourd et submergée de tristesse, elle réalisait pourtant qu’il était impossible de poursuivre ce chemin où les fleurs avaient fanées. Le soleil avait laissé place au brouillard et les oiseaux s’étaient arrêtés de chanter. Posés sur une branche, ils attendaient. Le monde était figé, résigné. Elle s’était affublée d’un masque s’efforçant de sourire aux uns et aux autres.
« La culpabilité n’est, après tout, qu’un sentiment de compassion à l’égard de la détresse et du malheur que l’on a causé. »
– Valère Staraselski
Alors que les mois s’enchainaient, vint ce triste jour où cet homme, qui la connaissait mieux que tout autre, finit par lui demander les raisons de son attitude morose.
Saisissant l’instant pour mettre fin à cette mascarade, elle endossa tristement le rôle d’un bourreau. Chaque mot qu’elle prononçait au milieu des larmes furent semblables à des coups de couteau. Elle lapidait ce pauvre homme qu’elle avait tant aimé au prétexte d’une vie trop parfaite précipitée dans l’ennui. Il tomba à genoux, entourant de ses bras les jambes de cette femme qu’il aimait par-dessus tout. Elle caressait son visage. Il avait été un extraordinaire complice de vie et se trouvait gratifié par une séparation. Elle ne cessait de pleurer, se détestant en le voyant dévasté par le chagrin.
Alors qu’elle était incapable de contenir le torrent de larmes qui brouillait son regard, elle déposa un dernier baiser sur son front. Un baiser d’adieu chargé d’une infinie douceur et d’un atroce sentiment de culpabilité.
Elle se dirigea ensuite vers les enfants qui s’assirent sur le canapé.
Elle endossa à nouveau le rôle du bourreau complètement anéantie par le chagrin.
Des larmes roulaient sur leurs joues alors qu’elle leur expliquait que l’amour qu’elle portait à leur père avait disparu et qu’ils auraient à présent deux maisons.
Les mois qui suivirent furent des mois de déprime, de nostalgie, de regrets, où les souvenirs flagellaient chacun de ces Êtres. Plongés dans le deuil, l’un par obligation, l’autre par choix.
De temps à autre elle apercevait, le cœur lourd, cet homme qui désormais était accompagné d’une autre. Elle poursuivait sa route, privée certains jours de ses enfants, conséquence de sa pénible décision.
Elle peinait à refaire sa vie, comparant tout homme qui y entrait, à celui qui lui avait donné une vie paisible et tranquille.
Elle avançait, jour après jour, rongée par un poids énorme, celui de la culpabilité. Un fardeau, une croix, qu’elle était convaincue de porter à jamais.
L’âme lourde de ce fardeau, elle devait accepter de se pardonner pour avancer. Elle devait se délester de ce poids insupportable. Libérer son esprit de ses tourments. Elle était consciente qu’elle cherchait une issue à sa vérité mais lorsque la liberté serait enfin dans son cœur, elle atteindrait enfin la paix.
« La culpabilité compte parmi l’un des sentiments les plus destructeurs que nous puissions entretenir. »
– Claudia Rainville